Au Pompidou de Metz, on a l'habitude des expositions un peu bizarres. Et bien souvent on résume ça sous le terme d'art abstrait. Mais cette fois-ci, le musée fait parler de lui pour sa nouvelle exposition : Paparazzi !
Un après-midi ensoleillé, un peu liberté, quelques amis et au programme l'exposition Paparazzi ! Photographes, stars et artistes présentés au centre Pompidou de Metz depuis le 26 février et ce, jusqu'au 9 juin. Et ce qu'on peut dire c'est que nous sommes loin de l'espèce de composition montrant une chaise bloquée entre quatre murs que l'on a connu aux débuts du Pompidou. Cette fois les murs du musée ont été recouverts de près d'un demi-siècle de furie paparazzi. Connus comme de véritables chasseurs d'images, les paparazzis se sont peu à peu élevés dans le monde de la photographie pour faire de leurs activités un métier à part entière. Entre éloge et démolition, on ne sait pas trop sur quel pied danser.
Le tapis rouge, les flashs, la nausée
Le tapis rouge, ça fait rêver il paraît. Pouvoir fouler du bout des talons le tissu pourpre sous les acclamations, devant les objectifs braqués sur votre démarche mesurée. La popularité, la notoriété, la vanité. Pour ma part, une nausée. À l'entrée du parcours, le visiteur est immédiatement plongé dans le bain de ce monde que nous méprisons ou, tout du moins, feignons de mépriser. Les flashs crépitent, on pourrait presque voir les paparazzis qui se précipitent. Une installation signée Malachi Farrell intitulée Interview (Paparazzi). On se sent opprimé, encerclé, harcelé. Une sensation voulue, pari tenu.
Un parcours en trois parties
On se balade parmi les clichés volés et on se rend compte que l'exposition est divisée en trois grandes parties : photographes, stars et artistes. La première partie est consacrée à la profession et au mythe du paparazzi. Vidéos, textes et photos légendées témoignent des débuts du métier à aujourd'hui. À mi-chemin entre photographes et espions, les paparazzis sont montrés sous un autre jour. Planqué dans une voiture, perché sur un arbre ou appuyé sur un muret, le paparazzi semble être partout. Cette section rend simplement compte du quotidien d'un des métiers les plus détestés, notamment à travers un extrait du film Reporters de Raymond Depardon diffusé dans cette partie de l'exposition. La planque, l'attente, la traque, la confrontation. Toutes les étapes y passent et parfois, un malaise qui envahit nos regards spectateurs.
La section dédiée aux stars posent les personnages de la sphère people comme des victimes parfois passives, parfois agressives des paparazzis. Et si le métier inclut surtout la gent masculine, il est vrai que les cibles sont bien souvent du sexe opposé. Et c'est comme un voyage dans le temps. Entre les traits dignes d'Elizabeth Taylor et les poses sulfureuses de Brigitte Bardot, l'acharnement sur Lady Diana et l'indiscrétion envers Jackie Kennedy-Onassis, l'image du paparazzi ne s'améliore pas au fil de la progression. Des clichés volés s'étalent sous les yeux des visiteurs mettant à mal toute tentative d'intimité. Mais parfois, les rôles peuvent être inversés. Refus poli ou agression, les stars sont montrées dans tous leurs états face aux photographes qui, parfois, ont ruiné des vies.
La dernière série de l'exposition s'adresse à l'aspect esthétique parfois artistique des rendus photographiques des paparazzis. L'activité ne se faisant pas en studio et la plupart du temps sans l'accord réel de la « star », les conditions engrangent une nouvelle forme, un nouveau genre photographique. Et si les paparazzis doivent faire preuve d'intuition, de rapidité, voire d'immédiateté, certains se sont appropriés l'esthétique même des « chasseurs d'images » notamment le Pop Art ou le Post-modernisme. Sur les murs, des assemblages, des collages souvent abstraits et qui interrogent bien des aspects du métier.
À vo(m)ir ?
Pour ma part, je ne regrette pas d'avoir perdu mon temps à visiter cette exposition. Intéressante, elle relate l'histoire d'un métier que l'on méprise et que l'on envie à la fois. Mais intéressant n'est pas synonyme de bon. Je m'explique. J'ai beaucoup aimé ce que cette exposition interrogeait, ce qu'elle amenait comme réflexion et surtout ce qu'elle avait de bien en apport historique. Parce qu'au fond, le people, le star system fait partie de l'histoire contemporaine. Alors pourquoi devrait-on étudier des tableaux où empereurs et rois se pavanent et ne pas étudier les clichés de ceux que je considère comme des rois des temps modernes ? Rois parce qu'ils sont adulés, enviés, surexposés, aimés et à la fois détestés mais toujours dans la visibilité. Est-ce que nous ne sommes pas tous, aujourd'hui, des paparazzis en puissance ? Est-ce qu'on ne dégaine pas nos téléphones et nos appareils pour capturer nos idoles quand ils se pointent en ville ou aux avant-premières, aux grillages après les concerts ?
Ce sont ces interrogations là qui me sont venues en tête dès le moment où j'ai posé mes yeux sur les premiers clichés. Et une remise en question terrible. Parce qu'à défaut de les publier dans des magazines, on les poste sur Facebook ces photos. Et en quoi est-ce qu'on aurait plus de légitimité que nos amis paparazzis ? Alors je pense que oui, cette exposition est à voir, même si parfois à vomir. Surtout tournée vers le sexe, surtout à exhiber Jackie Kennedy nue, l'entre-jambe certes captivant de Britney Spears ou les seins baladeurs de Paris Hilton. Les contenus ne sont pas forcément dignes d'intérêt, mais la rétrospective qu'ils posent l'est.
Photos : Nadège El Ghomari pour etudiant-metz.info